Trump, le pyromane

Incontestablement, il a gagné la bataille médiatique. Inexorablement, il a imposé son agenda aux médias. Indiscutablement, il a su faire de ce qu’il est le sujet numéro un de nos préoccupations d’aujourd’hui. Incontestablement, c’est un as de la communication, un homme qui a du flair quand il faut détecter ce qui va retenir l’attention, ce qui va faire les grands titres des journaux et ce qui va être au centre de nos discussions, chez nous, chez nos gouvernants respectifs et même dans chacun de nos réseaux sociaux. Je parle ici de Donald Trump. Avouons-le, pas un jour où l’on ne s’est demandé « Qu’a-t-il encore dit ? » ou « Qu’a-t-il encore fait ? ». Il nous obsède tous, tout autant qu’il demeure pour lui-même son propre sujet d’obsession. 

Dans une époque où des tsunamis d’information en tous genres nous submergent quotidiennement, Trump a su se hisser dans le top. Il est acquis que le sujet n’a pas besoin de brillance pour conquérir cette place. Le non-sens, la bêtise, le mensonge, l’ignominie, la vulgarité sont autant de mauvaises caractéristiques qui ne disqualifient plus un discours. Trump use de sa maîtrise des médias pour vous servir un contenu de mauvais goût voire dangereux. Venant du président des États-unis, plus le message est indécent, plus l’acte est grotesque et plus l’écho qui en résulte sera grand. 

Armes de diversion massive

À l’ère où chaque personne, dans presque chaque coin du globe, dispose d’un minimum de moyen d’accéder à l’information, Trump est devenu LE sujet. De nos préoccupations ou de notre amusement. Non seulement, Trump a compris depuis longtemps ce jeu, mais il en a même fait son crédo et sa marque. Chez lui, aux États-unis, devant le torrent d’accusations et de soupçons dont il est l’objet, il en a fait son arme de diversion massive. Quand une actualité lui est très défavorable, il en crée une autre avec pour seul objectif de faire oublier la première. Tel un pyromane, il allume feu puis contre feu pour distraire. Et à chaque fois, les médias mordent. Ils tournent la page. Un exemple parlant : la semaine dernière, devant la publication des mauvais chiffres de l’économie américaine, Trump tweete sur sa volonté de « reporter l’élection présidentielle » de novembre prochain. Le président sait qu’il n’en a pas le pouvoir. Seul le Congrès, par le vote d’une nouvelle loi, peut le faire. L’organisation matérielle des élections est du ressort des États et non du gouvernement fédéral. Par un seul tweet, la presse et l’opinion ont mordu. Qui se rappelle avec précision du chiffre de la baisse du PIB américain dans le dernier trimestre ? Dans les faits, l’économie américaine est en récession, après une chute de près de 33% de sa richesse. Trump ne voulait pas que cela tourne en boucle, lui qui a fait de l’économie son point fort. De même, devant le flot ininterrompu des mauvaises nouvelles à propos de l’épidémie du Coronavirus aux États-unis et le lien qui y est fait avec l’incompétence de l’administration Trump, le président redouble d’imagination pour qu’on parle d’autre chose. Voici pour le cirque médiatique. Mais quand il s’agit de menaces sérieuses sur le fonctionnement démocratique, de louer les nationalistes blancs ou dénigrer les minorités, le maître communicant devient un pyromane dans le vrai sens du terme.

Menace de guerre civile 

Le président Trump est aujourd’hui dépeint comme le président d’une minorité de nationalistes blancs. D’anciens proches collaborateurs, comme son ancien avocat personnel, des membres de sa propre famille, comme sa nièce Mary Trump, ne s’embarrassent plus de le décrire comme « raciste » et utilisant une terminologie de la sorte. Tel un pyromane, il souffle sur les braises dans une société américaine aujourd’hui au bord de la rupture. 

À présent, ils sont nombreux à ne plus exclure un scénario catastrophe après l’élection du 3 novembre prochain. D’une simple contestation des résultats à la mobilisation de ses supporters pour une protestation musclée, on prédit qu’en cas de défaite, l’actuel président n’acceptera pas facilement sa défaite. L’ex-stratège de Barack Obama, David Axelrod demande aux américains de se préparer : « ce qui s’est passé entre Bush et Gore en 2000 paraîtra un ‘jardin d’innocence’, comparé à ce qui va se passer après la prochaine élection, si Trump perdait », dit-il. Une des plus grandes plumes du NewYork Times Maureen Dowd écrivait ceci le 1er août dernier : « Comme Macbeth, Trump a fait des erreurs tragiques et a plongé le pays dans un cauchemar ». Même les observateurs étrangers les plus mesurés de la politique américaine deviennent de plus en plus alarmistes. Dans une tribune publiée la semaine dernière dans l’hebdomadaire Le Point, l’ancien ambassadeur de France à Washington dénonçait « le populisme de Trump » et mettait en garde contre la menace d’une guerre civile. Devant tant de mises en garde, il est temps de prendre au sérieux les actes de l’actuel président des États-unis non pas contre un autre peuple ou un autre pays, mais bien contre les siens.

Moktar Gaouad

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