Les sondages se suivent et se ressemblent. Ils donnent tous Donald Trump perdant en novembre prochain face à Joe Biden. Tout comme en été 2016, quand la candidate démocrate Hillary Clinton menait dans toutes les consultations pré-électorales. Il n’y a aucune raison de croire en des décomptes qui se sont largement discrédités il y a quatre ans et qui continuent d’utiliser quasiment les mêmes procédés. Il est loin d’être acquis que l’actuel président quittera la Maison Blanche en janvier prochain. Rappelons que l’élection présidentielle américaine se fait au suffrage indirect et que remporter le vote populaire ne suffit pas pour être élu.
Dans un pays si divisé, il est très probable que l’élection se jouera encore et comme d’habitude dans les swing states ou « États pivots » pour engranger un nombre suffisant de grands électeurs. En 2020, selon le site politique « FiveThirtyEight », tout se jouera dans le Wisconsin, la Caroline du nord, le Michigan et l’Arizona. En 2016, Donald Trump et ses conseillers avaient déjà tout misé sur les états indécis et ils continuent aujourd’hui dans leur stratégie.
Lendemain de conventions
À deux mois de l’élection présidentielle, tout peut encore arriver. Pourtant, les conventions des deux camps se sont déroulées et les américains connaissent tout de leurs deux candidats. Le choix est clair. Il est entre la continuité d’une présidence qui a rompu avec tous les dogmes et bousculé tant de normes – même les plus saines dans toute démocratie – et un retour à une présidence « normale ». Pour les familiers du rugby, il s’agira soit de transformer un essai marqué quatre ans auparavant ou d’arrêter net une mêlée qui risque de tout emporter. Trump est ce mouvement incontrôlé et Biden est le refuge que visent ceux qui veulent échapper à la bourrasque.
La semaine dernière, au lendemain de la convention républicaine, la très respectée revue « The Atlantic » titrait : « Et c’est ainsi que perd Biden ». Dans un long article consacré aux tensions sociales actuelles et à l’équation du maintien de l’ordre face aux protestations qui inévitablement apportent violence et destruction, le journaliste et dramaturge américain George Packer fait ce terrible constat à propos de Biden : « Rien ne peut nuire autant à une campagne que les voeux pieux, l’hésitation craintive ou la pure complaisance qui manquent de prendre en considération ce que les électeurs voient clairement ». George Packer détaille la contradiction chez les démocrates devant la question de l’ordre et la confusion qui est la leur sur bien des sujets. Enfin, il dénonce cet amalgame fait par la convention démocrate qui a intronisé Joe Biden : « La troisième nuit de la Convention était dominée par les mots et les images des manifestations, comme si l’ensemble des américains étaient des activistes ». Sous-entendu, les démocrates ont tort de croire que tous les électeurs se reconnaissent dans les mouvements de protestation actuels. À l’instar de la revue « The Atlantic », beaucoup d’observateurs ont reconnu que Donald Trump est sorti renforcé de ces deux semaines de conventions.
Election ouverte
Comment, avec tant de défiance à l’égard du système des équilibres de pouvoir américain, malgré une gestion calamiteuse de l’épidémie du Coronavirus et en dépit de l’exacerbation des tensions sociales, comment l’actuel président arrive-t-il à rester bien placé dans la course ? Bien que destitué par la Chambre des représentants, Trump n’a pas sombré. Alors à quoi attribuer sa survie politique ? Les États-unis sont dans une tourmente politique. Une large partie de la population blanche américaine croit que le pouvoir est en train de lui échapper. Ce n’est qu’une perception quand l’économie, la finance et tous les leviers du pouvoir politique, aussi bien au niveau local que fédéral, restent en grande majorité en leur possession. Trump l’a compris. Il sert cette perception à ses partisans. Il ne cache plus son jeu consistant à dresser ses supporters contre ceux qui, demain, les « dépouilleraient » d’un pouvoir qu’ils garderont quel que soit le résultat de la présidentielle du 3 novembre prochain. Mais il y a le fantasme, la peur entretenue par le camp de l’actuel président. Dans un pays où les mouvements migratoires sont sujets à toutes formes d’interprétation, ce point est essentiel. En face, les démocrates semblent tétanisés. Leur seule antienne est dorénavant de dénoncer « le jeu dangereux et les actes de division de Trump ». Cela suffira-t-il à faire perdre le candidat républicain ?
Biden en pôle position et Trump en embuscade mais renforcé, tel est l’état de la course à la Maison Blanche en ce 1er septembre. C’est juste le snapchat du moment, alors que rien n’est définitif. L’élection reste très indécise. Et à ceux qui, surtout en dehors des États-unis, ont déjà enterré le milliardaire arrivé à la Maison Blanche en 2016 envers et contre toute attente, disons : pas si vite ! Ce pays est totalement imprévisible. Ce qui fait sens ailleurs ne le fait pas forcément ici. Et vice versa.
Moktar Gaouad.
Excellent édito pour cette rentrée !
Moktar Gaouad en grande forme.
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Ah joie à te relire cher Moktar dont le regard acéré manquait. Un précieux rendez-vous. Et ça commence fort ce bas les masques !
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Very insightful as usual. Many thanks Brother Moktar
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